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Section II – l’instruction préparatoire

A)   Généralités

B)   La saisine de la juridiction d’instruction

C)   L’instruction par le juge d’instruction

D)   La clôture de l’instruction par le juge d’instruction

E)   La Chambre de l’instruction

A) Généralités

Juge d’instruction – Mission dédiée à la recherche de la vérité - Devoir de loyauté.

Cass. (Ch.réunies) 31 janvier 1888 (arrêt V...) a condamné un juge d’instruction qui avait usé de manœuvres déloyales à une peine disciplinaire.<

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instruction préparatoire - constitution du dossier de personnalité - appréciation souveraine par la juridiction d’instruction de la suffisance des renseignements rassemblés.

Cass.crim. 1er décembre 1960 (D. 1961 385 note M.R. M.P.)

K.... et autre.

Sur le moyen de cassation pris de la violation de l’art. 81 C.pr.pén., de l’art. 7 de la loi du 20 avril 1810, violation des droits de la défense et manque de base légale, en ce que le magistrat instructeur n’a pas fait procéder à l’enquête sociale prévue par le 5e alinéa de l’art. 81, alors que cette enquête est obligatoire pour le juge et que des renseignements qui ont été recueillis au cours de l’instruction par les enquêteurs ne sauraient constituer l’enquête rendue obligatoire par la disposition légale précitée ;

            Attendu que la disposition de l’art. 81, avant-dernier alinéa, C.pr.pén. qui fait un devoir au juge d’instruction de ne pas se borner à rassembler les preuves de la culpabilité ou de la non-culpabilité, mais de réunir, dans la mesure du possible les renseignements qui permettront aux juridictions de jugement de déterminer et de mesurer la peine éventuellement applicable, ne déroge pas à la règle fondamentale d’après laquelle les juridictions d’instruction ont le droit et l’obligation de clore leur information lorsqu’elles estiment que celle-ci est complète;

            Qu’il suit de là que le juge d’instruction et la chambre d’accusation, de même qu’ils auraient eu le devoir de prescrire toutes mesures nouvelles d’information, s’ils s’étaient estimés insuffisamment renseignés sur la per­sonnalité des inculpés, ont pu aussi considérer que les renseignements dont ils disposaient à cet égard étaient suffisants, en l’état du dossier; d’où il suit que le moyen doit être rejeté...

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B) La saisine du juge d’instruction

Saisine du juge d’instruction - Appréciation de la compétence au jour de la saisine.

Cass.crim. 21 septembre 1911 (B..., ci-dessus VI 3°) : « La résidence attributive de compétence judiciaire est celle du prévenu au temps de la plainte ou de la poursuite ».

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action civile - plainte avec constitution de partie civile - mise en mouvement de l’action publique - devoir pour le juge d’instruction d’informer sur la plainte.

Cass.crim. 8 décembre 1906 (S. 1907 I 377 note Demogue),

P... c. T....

Pourvoi en cassation du procureur général près la Cour d’appel de Paris.

Attendu qu’une plainte contre divers, du chef de faux et de complicité de ce crime, a été déposée par le sieur P... aux mains de l’un des juges d’instruction près le Tribunal de la Seine, le 24 février 1906; que, après avoir reçu les déclarations du plaignant, qui s’est constitué partie civile, et après avoir communiqué les pièces au procureur de la République, lequel a conclu : « qu’il n’y avait lieu de délivrer de réquisitoire d’informer », le juge d’instruction a, suivant ordonnance en date du 2 mars, déclaré « n’y avoir lieu à poursuivre »;

Attendu que, par l’arrêt attaqué, la Chambre des mises en accusation s’est déclarée compétente et régulièrement saisie à l’effet de faire droit sur l’opposition formée à l’exécution de ladite ordonnance par la partie civile, laquelle concluait à ce qu’il fut prescrit information sur sa plainte;

Attendu que le procureur général, demandeur au pourvoi, soutient que la plainte de la partie civile, dans les conditions prévues par l’art. 63 C.instr.crim., ne met pas en mouvement l’action publique; que, dès lors, le juge d’instruction avait dû nécessairement se conformer aux réquisitions de non-lieu à instruire, qui lui interdisaient d’une manière absolue toute autre décision, et que, conséquemment la chambre des mises en accusation, dépourvue, dans ce même cas et pour le même motif, du droit d’informer ou faire informer défini dans les art. 228 et 235 du même Code, n’avait pu, sans excès de pouvoir, retenir la connaissance d’une opposition à laquelle il ne lui appartiendrait légalement de donner aucune suite;

Mais attendu que cette interprétation des textes de la matière ne peut être accueillie; qu’aux termes précis et formels de l’art 63 C.instr.crim. : « Toute personne qui se prétendra lésée par un crime ou un délit pourra en rendre plainte et se constituer partie civile devant le juge d’instruction, soit du lieu du crime ou du délit, soit du lieu de la résidence du prévenu, soit du lieu où il pourra être trouvé »; qu’il résulte, d’autre part, de l’art. 3 du même Code, que les juridictions répressives ne peuvent statuer sur l’action civile qu’autant qu’elles ont été saisies en même temps de l’action publique, et que, dès lors, en investissant la partie lésée du droit de saisir de l’action civile le juge d’instruction, le législateur a nécessairement entendu que le dépôt même de la plainte entre les mains de ce magistrat, avec constitution de partie civile, mettrait également en mouvement l’action publique;

Attendu que la disposition de l’art. 63, précité, renferme donc l’un des tempéraments apportés par la loi, notamment dans les art. 64 §  2, 145, 135 C.inst.crim., au principe général suivant lequel, aux termes de l’art. 1er du même code, l’action pour l’application des peines n’appartient qu’aux fonctionnaires auxquels elle est confiée par la loi; que le droit pour la partie civile de mettre en mouvement, à ses risques et périls, l’action publique devant le juge d’instruction, s’accorde et se coordonne avec toutes les autres dispositions qui, notamment dans les textes précités, établissent, pour cette partie, un droit parallèle à celui du ministère public; que, plus spécialement, lorsqu’une informa­tion s’impose parce que l’acte dommageable a le caractère de crime, la disposition de l’art. 63, qui serait sans objet si la plainte devant le magistrat instructeur ne saisissait pas sa juridiction, représente l’équivalent légal et nécessaire de la protection qu’assure le droit de citation directe en matière correctionnelle et de simple police;

Attendu que la poursuite suscitée par la partie civile devant le juge d’instruction offre donc nécessairement, aussi bien que celle qui résulte d’une citation directe, les mêmes caractères que si elle avait été requise par le ministère public; qu’il faut, dès lors, et par voie de conséquence, appliquer au cas prévu dans l’art. 63 la règle absolue suivant laquelle la juridiction d’instruction a, comme toute autre, le droit et le devoir de s’exercer dans une pleine indépendance des réquisitions de la partie publique; que cette règle, d’ailleurs primordiale, ressort surabondamment des art. 128, 129, 130 C.inst.crim., qui prévoient le cas où le juge d’instruction a, conformément à l’art. 127, communiqué au procureur de la République la procédure terminée; qu’on ne saurait, sans méconnaître le caractère le plus essentiel des attributions du juge, admettre davantage qu’il soit lié par les réquisitions intervenues au début de la procédure, sur les pièces communiquées en exécution de l’art. 70 du même code; que toute distinction à cet égard serait contraire aux textes, qui n’en contiennent aucune, et aux principes mêmes de notre droit public ;

Attendu qu’il suit de ce qui précède que, quelles que soient les réquisitions prises par le ministère public, au vu de la communication prescrite par l’art. 70 susvisé, le juge d’instruction, saisi, conformément à l’art. 63, d’une plainte avec constitution régulière de partie civile, et d’ailleurs compétent aux termes du même article, a, sous la garantie, pour cette partie, du recours institué dans l’art. 135 C.instr.crim., le devoir d’informer sur la plainte dans telle mesure qu’il appartient; que cette obligation ne cesse que si le juge d’instruction décide, en l’état, soit que, d’ores et déjà, la prévention est suffisamment établie pour être procédé ainsi qu’il est dit aux art. 129, 130, 133, soit que, pour des causes affectant l’action publique elle-même, les faits ne peuvent légalement comporter une poursuite, ou que, à les supposer démontrés, ils ne sauraient admettre aucune qualification pénale;

Attendu, dès lors, qu’en se déclarant compétente pour statuer sur l’opposition formée par P..., partie civile, à l’ordonnance rendue le 2 mars 1906, la chambre des mises en accusation de la cour d’appel de Paris n’a commis ni un excès de pouvoir, ni violation de la loi;

Par ces motifs, Rejette...

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Saisine du juge d’instruction – Cas où la partie civile peut saisir le juge d’instruction.

Cass.Ch.réunies. 24 avril 1961 (Sté B... c. L... et autre, ci-dessus VII 4 C.) :
 « Si la partie civile qui a saisi le juge d’instruction ne peut abandonner la voie de l’instruction préparatoire pour traduire directement l’inculpé devant la juridiction correctionnelle, elle peut, au contraire, après clôture de l’information, user de la voie de la citation directe contre une personne qui n’a pas été l’objet de l’instruction requise ».

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C) L’instruction par le juge d’instruction

Commission rogatoire – Missions pouvant être confiées à un officier de police judiciaire – Écouter la conversation qu’un détenu tient au parloir de la prison (oui).

Cass.crim. 12 décembre 2000 (Bull.crim. n°369 p.1113)

C... et X...

Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 81, 114, 145, al.7, 170 et 802 C.pr.pén., 6.1 de la Conv.EDH, ensemble violation des droits de la défense ;

En ce que l’arrêt attaqué a rejeté la requête en nullité formée par C... et X...;

Aux motifs que, par commission rogatoire du 15 octobre 1998, le juge d’instruction de Saint-Malo a chargé les services de gendarmerie de mettre en place un dispositif d’interception des conversations tenues lors des parloirs accordés aux proches de C... et X... détenus dans les maisons d’arrêt de Ploemeur et de Rennes, et de reproduire sur procès-verbaux les renseignements intéressant l’enquête en cours (cote D 442) ; que, si la confidentialité des entretiens et de la correspondance des détenus avec leurs avocats est garantie, il ressort des dispositions des articles D 406 et D 407 C.pr.pén. que les conversations des détenus avec leur famille durant les visites au parloir doivent avoir lieu en la présence de personnel pénitentiaire, lequel doit pouvoir entendre et comprendre la conversation qui doit se dérouler en français ; que les usagers de ces parloirs, qui sont informés des conditions dans lesquelles s’effectuent ces visites, n’ignorent donc pas l’absence de confidentialité des paroles prononcées et qui peuvent d’ailleurs être rapportées par le personnel pénitentiaire qui, de la même manière, exerce un strict contrôle de la correspondance échangée entre les détenus et leur famille, certaines lettres pouvant être adressées au juge d’instruction pour son information ; qu’ainsi, l’enregistrement sur instruction du magistrat des conversations tenues dans ces parloirs relève de ce pouvoir de contrôle prévu par la loi et n’excède pas les pouvoirs que le juge tient de l’article 81 C.pr.pén., que de tels enregistrements ne constituent nullement des auditions déguisées puisque la personne mise en examen ne répond pas à des questions qui lui sont posées dans le cadre de l’instruction, mais échange librement et en toute connaissance de cause avec ses proches des propos soumis à surveillance, ce qui exclut nécessairement toute atteinte à la vie privée ; qu’ils ne portent donc pas atteinte aux droits de la défense prévus par- l’article 114 C.pr.pén. et ne violent pas les dispositions de l’article 6 de la Conv.EDH;

Alors que l’enregistrement effectué de manière clandestine par un policier agissant dans l’exercice de ses fonctions, des propos tenus par une personne mise en examen, élude les règles de procédure et compromet les droits de la défense;

Attendu que, pour écarter la nullité, tirée de l’irrégularité de la commission rogatoire prescrivant l’interception des conversations tenues au parloir de la maison d’arrêt par C... et X... avec leurs proches, titulaires d’un permis de visite, l’arrêt prononce par les motifs reproduits au moyen ;

Attendu qu’en cet état, la chambre d’accusation a justifié sa décision ;

Qu’en effet, l’écoute et l’enregistrement des conversations tenues par la personne mise en examen au parloir de la maison d’arrêt, qui sont soumises de droit à la surveillance du personnel pénitentiaire, ne constituent pas, au sens de l’article 8 de la Conv.EDH, une ingérence dans l’exercice du droit au respect de la vie privée, du domicile et de la correspondance ; que ces mesures peuvent être prescrites par le juge d’instruction, en application des articles 81, alinéa 1°1, 151 et 152 C.pr.pén., pourvu qu’elles aient lieu, comme en l’espèce, sous son contrôle et dans des conditions ne portant pas atteinte aux droits de la défense ;

D’où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

NOTE. Rapprocher Cass.crim. 31 mars 1998 (Gaz.Pal.1998 Chr.crim. p. 122), concernant également l’écoute de conversations se tenant au parloir. Ces conversations ne peuvent présenter un caractère secret que si elles sont tenues avec le défenseur du détenu.

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Instruction par le juge d’instruction – Mandat de perquisition – Mission qui peut être confiée aux policiers – Recherche d’objets (oui) – Sonorisation de l’appartement (non).

Cass.crim. 15 février 2000 (Bull.crim. n° 68 p.184), sommaire :

Aux terme des art. 56, 94 et 152 C.pr.pén., les perquisitions ordonnées par le juge d’instruction ne peuvent avoir d’autres fins que la recherche d’objets utiles à la manifestation de la vérité.

Dès lors, est irrégulière la commission rogatoire par laquelle le magistrat instructeur prescrit à un officier de police judiciaire de procéder, à l’occasion d’une perquisition, à la mise en place d’un équipement permettant de capter et d’enregistrer à distance les conversations (opération dite de sonorisation d’un appartement).

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Expertise – Notion d’expertise – Distinction d’avec la mission purement matérielle.

Cass.crim. 17 mars 1987 (Gaz.Pal. 1987 II somm.290, V...n), sommaire :

La désignation par le juge d’instruction d’un laboratoire pour analyser le sang prélevé sur le cadavre d’un enfant lors de l’autopsie pratiquée le même jour, en déterminer le groupe sanguin complet et la teneur en alcool n’impliquait aucune interprétation ou avis portant sur les résultats obtenus et entrait dans le cadre de simples constatations qui pouvaient être faites avec l’assistance d’un tiers sans être astreintes à l’observation des prescriptions des art. 156 et suiv. C.pr.pén.

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Expertise médicale – actes des médecins couverts par le fait justificatif de commandement de l’autorité légitime, sauf abus manifeste.

Trib.corr. Seine 23 février 1949 (Gaz.Pal. 1949 I 140)

Dr H... (affaire du penthotal, dit sérum de vérité)

Le Tribunal,

Attendu que le sieur C... a fait citer devant ce Tribunal les Drs H..., G... et L..., dont il demande la condamnation aux peines prévues par la loi et à 100.000 F de dommages-intérêts en réparation des délits de coups et blessures et violation du secret professionnel que ces médecins-experts auraient commis en pratiquant sur lui une injection de penthotal et en indiquant « dans leur rapport » que ledit C... était un simulateur ;

Attendu qu’à la date du ... M. le juge d’instruction Dupin a commis les docteurs sus-désignés aux fins d’examiner C... à nouveau; dire si son état s’est amélioré, aggravé ou est stationnaire ; si C... peut ou non subir un interrogatoire et répondre aux accusations nombreuses et graves relevées contre lui ; dire si la détention a eu une influence sur son état et si les soins donnés par le service médical pénitentiaire ne sont pas ceux qui conviennent aux troubles présentés par ce détenu ;

Attendu qu’il est constant que pour obtenir les renseignements demandés par le magistrat instructeur, le Dr H... a pratiqué sur l’inculpé C... une piqûre de penthotal afin de provoquer chez lui un état hypnagogique au cours duquel serait facilité le diagnostic de la maladie dont il prétendait être atteint, et, qu’en fait, il simulait ;

Attendu qu’il apparaît que le Dr H... n’avait nullement l’intention de profiter de la « période d’endormissement » ou d’éveil du sieur C... pour procéder à un interrogatoire (qui ne pouvait d’ailleurs avoir aucune valeur) sur les faits qui lui étaient reprochés, mais d’opérer un traitement inoffensif lui permettant (dans le cadre de la mission qui lui était impartie) de déjouer les ruses de l’inculpé et de déceler sa simulation par les moyens que la science médicale mettait à sa disposition: qu’il s’agissait donc bien d’une narcose uniquement destinée à déterminer un diagnostic en établissant l’existence d’une lésion corporelle ;

Attendu qu’un examen médical comporte nécessairement certains actes qui, s’ils sont complètement anodins dans leurs effets physiologiques, ne peuvent être interdits aux praticiens ; qu’il résulte d’ailleurs des renseignements fournis au Tribunal et des témoignages entendus à l’audience que C... (qui bien que s’abstenant volontairement de parler se faisait parfaitement comprendre) a accepté de subir la piqûre qui lui était proposée ; qu’il s’est étendu sur la couchette préparée à cet effet et a tendu son bras pour permettre l’opération qui a duré plusieurs minutes sans aucune opposition du patient alors que celui-ci pouvait, d’un simple geste ou mouvement de son bras, y mettra fin ;

Attendu qu’il n’est pas douteux que cette piqûre ne lui a causé aucune douleur appréciable et qu’elle ne pouvait nuire à sa santé ; qu’en raison de ce fait, ainsi que de son acceptation préalable de la piqûre, on ne saurait considérer que cette intervention médicale est susceptible de constituer le délit de coups et blessures volontaires ou violences, même légères au sens des art. 309 et s. ou 479 § 14 C.pén. ;

Attendu, il est vrai, que C... poursuit le Dr H... non seulement à raison des voies de fait exercée sur sa personne, mais aussi de la contrainte morale dont il aurait été victime et qui, facilitée par la piqûre, a amené la découverte et l’aveu de son imposture ; qu’il n’a accepté, dit-il, cette intervention que parce qu’il n’en prévoyait pas la portée ; qu’il reproche, en conséquence à l’expert d’avoir, en agissant par surprise, réussi à lui faire prononcer quelques mots alors qu’il voulait se taire, et dévoilé ainsi sa supercherie, et la simulation de la maladie dont il se prétendait atteint ; que, selon l’expression de ses représentants à l’audience, le Dr H... aurait extorqué sa volonté ou escroqué ses pensées en pénétrant abusivement dans son subconscient ;

Mais attendu que la modification du. psychisme déterminée par la piqûre (théoriquement admise par certains lorsque l’intérêt social l’exige, et réprouvée par d’autres au nom de la liberté individuelle) ne saurait en tout cas être assimilée aux violences physiques seules réprimées en l’état actuel de la législation ; que 1e tribunal ne peut que constater que si une telle intervention est susceptible de constituer une atteinte au libre arbitre sur un plan exclusivement médical, elle n’engage pas la responsabilité pénale de ses auteurs, et ne saurait, dans le silence des textes, être tenue pour passible d’une sanction ;

Sur la violation du secret professionnel.

Attendu que les révélations indiscrètes commises par un médecin sont prévues et punies par la loi ;

Mais attendu qu’il est généralement admis par la jurisprudence qu’un médecin expert qui a été régulièrement chargé par une juridiction, d’un examen médical, a le devoir de s’expliquer sur toutes les observations auxquelles l’accomplissement de sa mission l’amène à se livrer pour éclairer la justice ; qu’on ne . saurait donc reprocher sérieusement aux Drs H..., G... et L..., d’avoir commis le délit de violation du secret professionnel, dès lors qu’ils se sont bornés à exécuter le mandat judiciaire qu’ils avaient reçu d’un juge d’instruction et à en rendre compte au magistrat qui les avait commis ;

Attendu qu’il échet, en conséquence, de dire que les actes reprochés aux inculpés ne sont pas constitutifs des délits de coups et blessures et violation de secret professionnel qui apparaissent comme insuffisamment caractérisés ; qu’il y a donc lieu de les relaxer purement et simplement des fins de la poursuite et de condamner la partie civile aux dépens ; que la demande reconventionnelle intentée contre C... doit être égaiement rejetée comme non caractérisée, la présente action ne paraissant pas avoir été intentée par, malice ou de mauvaise foi.

Par ces motifs,

Relaxe les Drs H..., G... et L..., des fins de la poursuite ;

Rejette la demande reconventionnelle intentée contre C... ;

Condamne C... en tous les dépens.

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perquisitions - perquisition dans un cabinet d’avocat - présence du bâtonnier - juge d’instruction seul habilité à prendre connaissance des documents.

Cass.crim. 24 mars 1960 (D. 1960 531 note Crémieu)

S...

Sur le moyen de cassation, pris de la violation des art. 56 et 96 C.pr.pén. et 378 C.pén., de l’art. 7 de la loi du 20 avr. 1810 et des droits de la défense, défaut de motifs, manque de base légale...

Attendu qu’il est soutenu par le moyen proposé, comme il l’avait été par les conclusions déposées devant la Chambre d’accusation, que la perquisition, opérée le ler décembre 1959, sur commission rogatoire du magistrat instructeur de N... par l’un des juges d’instruction de N... dans les cabinets de deux avocats de cette ville, était irrégulière, au motif que tous les documents placés dans le cabinet d’un avocat sont présumés susceptibles de contenir les secrets de la défense et qu’en conséquence leur examen doit être opéré non par le juge d’instruction, mais par le bâtonnier ou son représentant;

Attendu qu’il résulte des énonciations de l’arrêt attaqué que, pour effectuer la perquisition critiquée, le juge d’instruction s’est, ainsi que le constate le procès-verbal, fait assister du bâtonnier de l’ordre des avocats de N..., qui a été présent à toutes les opérations; que ce bâtonnier n’a formulé aucune objection;

Attendu qu’en déclarant la perquisition régulière, la Chambre d’accusation a fait une exacte application des dispositions de l’art. 96 C.pr.pén., et plus spécialement, de celles contenues dans l’alinéa 3 dudit article; qu’en effet, aux termes de ces dispositions, les opérations de perquisition entrent dans les attributions du juge d’instruction; qu’en conséquence il a seul le droit de prendre connaissance des papiers et documents avant de procéder à leur saisie et que le bâtonnier, lorsque la perquisition a lieu dans le cabinet d’un avocat, a pour rôle d’assurer le respect du secret professionnel et des droits de la défense, et non pas, comme le soutient à tort le demandeur, de procéder lui-même à la perquisition;

Attendu qu’en l’espèce le procès-verbal ne mentionnant ni objection, ni protestation du bâtonnier, il est établi que le juge d’instruction n’a, au cours de la perquisition critiquée, en aucune manière, excédé ses pouvoirs ou violé le secret professionnel ou les droits de la défense et qu’il au contraire, exactement appliqué les dispositions de l’art. 96 C.pr.pén., qui confie à son honneur et à sa probité professionnelle le mission de rechercher et de saisir, où ils se trouvent, les documents utiles à la manifestation de la vérité;

Par ces motifs, rejette...

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Instruction criminelle – Perquisition dans un cabinet d’avocat – Saisie des correspondances entre l’avocat et son client – conditions.

Cass.crim. 5 octobre 1999 (Bull.crim. n°206 p.653) sommaire :

Si les correspondances échangées entre l’avocat et son client sont couvertes par le secret et échappent à la saisie opérée par le juge d’instruction, il en va autrement lorsqu’il s’agit d’écrits ayant donné lieu à la mise en examen dudit conseil, l’implication de ce dernier dans l’affaire en cause rendant inopérante son argumentation relative à la confidentialité et à l’atteinte portée au secret professionnel.

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Instruction par le juge d’instruction – Documents saisis dans un cabinet d’avocat – Conditions pour que le juge puisse en refuser la restitution

Cass.crim. 30 juin 1999 (Bull.crim. n° 172 p.506) :

Il résulte des art. 97 et 99 C.pr.pén. de l’art. 8 Conv.EDH que le juge d’instruction peut s’opposer à la restitution de documents saisis dans le cabinet d’un avocat et couverts par le secret professionnel, dès lors que leur maintien sous la main de la justice en vue de déterminer l’existence d’infractions pénales est nécessaire à la manifestation de la vérité et qu’il ne porte pas atteinte aux droits de la défense.

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D) La clôture de l’instruction par le juge d’instruction

Instruction par le juge d’instruction – Avis de fin d’information – Notification à toutes les parties.

Cass.crim. 9 janvier 1995 (Gaz.Pal. 1995 I Chr. 245) :

Aussitôt que l’information lui paraît terminée, le juge d’instruction en avise les parties et leurs avocats. Cet avis doit être donné à toutes les parties et à leurs conseils à l’issue du dernier acte d’information.

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Instruction par le juge d’instruction – Avis de fin d’information – Nécessité d’une notification régulière.

Cass.crim. 22 mars 2000 (Gaz.Pal. 5 octobre 2000) :

Seule la notification régulière de l’avis de fin d’information fait courir le délai de vingt jours accordé aux parties pour formuler une demande ou présenter une requête en annulation.

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Ordonnance de non-lieu – Non-lieu rendu faute de charges suffisantes – Décision n’ayant qu’une autorité provisoire.

Cass.crim. 9 novembre 1965 (Bull.crim. n°224 p.507, V...i) :

Une ordonnance de non-lieu faute de charges suffisantes n’a qu’une autorité provisoire ; les poursuites peuvent être reprises dès qu’il apparaît de nouvelles charges résultant d’investigations postérieures à l’ordonnance de non-lieu.

E) L’instruction par la Chambre de l’instruction

instruction préparatoire - renvoi devant la juridiction de jugement - nécessité que le défendeur ait été auparavant entendu ou dûment appelé.

Cass.crim. 12 octobre 1972 (DS 1973 170 note Pradel)

C....

Sur le moyen de cassation, pris de la violation des­ art. 105, 114 et s., 283 C.pr.pén., 485 et 593 du même code...;

Attendu que nul ne peut être jugé, ni mis en accusation, sans avoir été entendu ou dûment appelé ;

Attendu qu’il résulte des énonciations de l’arrêt attaqué que C..., qui avait pris la fuite dès l’ouverture de l’information, a été écroué en exécution d’un mandat d’arrêt, postérieu­rement à la date de l’ordonnance de transmission de pièces au procureur général ;

Attendu que, pour rejeter une requête de C..., qui demandait à fournir ses explications au cours d’un supplément d’information, ce même arrêt mentionne que la procé­dure était régulière dès lors que le demandeur s’était mis dans l’impossibilité d’être interrogé, et avait été régulièrement appelé par un mandat de justice, notifié au dernier domicile connu et diffusé sur tout le territoire national ;

Mais attendu qu’en statuant ainsi, la Chambre d’accusation a gravement méconnu les droits de la défense; qu’en effet, en matière criminelle, seul l’arrêt de renvoi marque la clôture de l’information; d’où il suit qu’en renvoyant un inculpé, alors détenu, devant la Cour d’assises, sans lui faire connaître les faits qui lui étaient imputés, et en refusant de recevoir ses explications, alors qu’il n’avait jamais été entendu, l’arrêt a enfreint les dispositions, imposées à peine de nullité, par les art. 114 et 170 C.pr.pén. ; d’où il suit que la cassation est encourue...

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