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e - Le concours de qualification

Qualification des faits - concours de qualifications - dépôt d’explosifs dans un lieu habité - poursuites cumulées pour attentat aux personnes et pour attentat aux biens.

Cass.crim. 3 mars 1960 (Bull.crim. n° 138 p.286).

G... et Ben H...

Sur le moyen unique de cassation pris de la violation de l’art. 5 C.pén., de l’art. 1351 du C.civ., violation de l’art. 90 du Code de justice militaire, en ce que les inculpés ayant été accusés d’avoir, l’un jeté et l’autre donné des instructions en vue de jeter une grenade dans l’immeuble du Café de la Poste, deux questions portant sur le même fait principal autrement qualifié ont été posées au Tribunal militaire, l’une retenant la qualification de tentative de destruction d’immeubles par explosif et l’autre retenant, pour le même fait, la qualification de tentative d’homicide volontaire avec préméditation; alors qu’un même fait diversement qualifié ne saurait entraîner une double déclaration de culpabilité;

Attendu que le Tribunal permanent des Forces armées a répondu affirmativement aux deux questions suivantes :

1e Question.« Est-il constant que, le 1er juin 1958, en tout cas postérieurement au 30 octobre 1954, à C... (Alger), il ait été tenté de détruire, en tout ou partie, par l’effet d’une substance explosible, l’immeuble du café de la Poste, tentative qui, manifestée par un commencement d’exécution, le fait de lancer une grenade à l’intérieur de cet établissement, n’a été suspendue ou n’a manqué son effet que par des circonstances indépendan­tes de la volonté de son ou de ses auteurs, le jet de la grenade n’ayant causé que quelques dégâts matériels ? »;

2e Question.« Est-il constant que, le 1er juin 1958, en tout cas postérieurement au 30 octobre 1954, à C... (Alger), il ait été tenté de commettre volontairement -en une seule et même action- des homicides sur les personnes se trouvant dans le café de la Poste, tentative qui, manifestée par un commencement d’exécution, le jet d’une grenade à l’intérieur de cet établissement, n’a été suspendue ou n’a manqué son effet que par des circonstances indépendantes de la volonté de son ou de ses auteurs, le fait que les blessures n’ont pas été mortelles ? »;

Qu’il résulte des réponses aux autres questions que Ben H... a été déclaré coupable de l’une et l’autre de ces tentatives et que G... a été déclaré coupable de complicité de ces deux crimes par instructions données et fourniture de moyens; qu’en conséquence, le Tribunal a condamné les deux accusés à la peine de mort, tant par application des art. 434 et 435 C.pén., que des articles 295, 296, 297 et 302 du même Code;

Attendu que si la loi punit de la peine de mort la destruction par l’effet d’un explosif d’un édifice habité ou servant à l’habitation, parce que ce fait met en péril des vies humaines, ce crime n’en est pas moins essentiellement établi en vue d’assurer la protection des propriétés; qu’il est constitué dans tous ses éléments dès que son auteur a agi volontairement sachant qu’il détruisait ou tentait de détruire un édifice de cette espèce, sans qu’il soit nécessaire qu’il ait eu aucun dessein homicide;

Qu’il suit de là que si l’auteur d’un tel attentat a eu en vue, indépendamment de la destruction de l’édifice, la mort de personnes, qu’elles habitent ou non le local soumis à l’action de l’explosif, il commet un second crime, dont l’élément matériel est constitué sans doute par le même fait, mais qui se distingue du premier par son élément intentionnel, qui est la volonté de tuer;

Qu’il ne s’agit pas, en tel cas, d’un crime unique, dont la poursuite sous deux qualifications différentes serait contraire au vœu de la loi, mais de deux crimes simultanés, commis par le même moyen, mais caractérisés par des intentions coupables essentiellement différentes;

Attendu que c’est à juste titre, dès lors, que le Tribunal militaire a statué sur la double accusation dont il était saisi; que sa réponse affirmative aux questions se rapportant à l’une et l’autre n’est entachée d’aucune irrégularité, alors d’ailleurs que la position de l’art. 5 C.pén. a été observée, et qu’une seule peine a été prononcée...

Rejette...

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Qualification - concours de textes - acte unique - atteinte a un intérêt unique - incrimination la plus sévère seule applicable.

Cass.crim. 10 février 1965 (Bull.crim. n° 44 p. 97)

D...

Sur le moyen de cassation pris de la violation des art. 379, 401, R.40 § 8 C.pén., les art. 485 et 593 C.pr.pén., contradiction et défaut de motifs, manque de base légale...

Attendu qu’il appert de l’arrêt attaqué et du jugement qu’il confirme que D... a abattu les arbres en cause, non dans l’intention de nuire, mais pour se les approprier, et l’a d’ailleurs justement condamné pour soustraction frauduleuse desdits arbres;

Mais attendu que c’est à tort que les juges du fond ont également retenu contre le prévenu la contravention de coupe d’arbre prévue et punie par l’art. R.40 § 8 C.pén., le même fait étant inclus dans les agissements reprochés au demandeur sous la qualification de vol;

D’où il suit que la cassation est encourue de ce chef, mais doit être prononcée par voie de retranchement et sans renvoi...

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Qualification - dénombrement des agissements punissables - un seul acte accompli, un seul intérêt lésé - une seule qualification possible.

Cass.crim. 27 mars 1968 (Gaz.Pal. 1968 I 320).

B...

Sur le moyen de cassation, pris de ce que la règle de non-cumul des peines édictée par l’art. 5 C.pén. ne s’applique pas aux contraventions;

Attendu qu’il appert du jugement attaqué que B... était poursuivi pour un même fait de stationnement commis le 6 octobre 1966, à Lyon, en un point où tout stationnement est interdit, mais qui est compris dans une zone à stationnement réglementé, et alors que le véhicule de B... est demeuré audit emplacement au-delà de la durée indiquée par son « disque »;

Que, dans ces conditions, c’est à bon droit que le tribunal n’a condamné B... qu’à, une amende unique de 20 F pour stationnement interdit, et l’a relaxé du chef de dépassement du temps de stationne­ment autorisé, au motif que la réglementation relative au stationnement à durée limitée ne saurait recevoir application là où le stationnement est interdit;

Qu’en effet, si la règle du non-cumul des peines édictée par l’art. 5 C.pén. n’est pas applicable en matière de contraventions, encore faut-il, pour que des condamnations cumulatives puissent être prononcées, qu’il existe autant de fautes distinctes, punissables séparément, qu’il est prononcé de condamnations à une peine de police; qu’en l’espèce, le fait unique de stationnement illicite retenu contre B... ne pouvait être arbitrairement divisé en un stationnement interdit et en un stationnement prolongé au-delà de la durée autorisée, puisque au lieu où le prévenu a stationné, aucune durée n’était autorisée;

Qu’ainsi le moyen doit être écarté;

Rejette...

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Concours et conflits de qualifications - Arrestation, détention et séquestration arbitraire - crimes distincts.

Cass.crim. 24 janvier 1996 (Gaz.Pal. 1996 I Chr. p.74) : L’arrestation illégale d’une part, la détention illégale et la séquestration d’autre part, constituent deux crimes distincts dont la nature et les éléments constitutifs sont différents.

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Qualification des faits – Interdiction de retenir un même fait comme constitutif de deux circonstances aggravante différentes.

Voir Cass.crim. 4 février 1998 (Bull.crim. n° 44 p.111, Pourvoi n° 97-86.090).

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